Secret et connaissance d’un délit

Ce qu’il faut retenir sur connaissance d'un délit et secret professionnel

- La connaissance de faits classifiés comme délictuels par la législation se produit dans plusieurs types de situations : des mineurs, ou leurs parents, qui dévoilent au professionnel une consommation de stupéfiants… Des personnes refusant de payer une pension alimentaire ou de présenter l’enfant à l’autre parent comme ordonné par le juge aux affaires familiales ; un parent révélant vivre seul avec son enfant et percevant une prestation sociale à laquelle il n’a pas droit ou encore des personnes en situation irrégulière de séjour… Les exemples ne manquent pas de ces situations où existent de possibles délits.

- Le législateur n’a pas obligé les professionnels soumis au secret à révéler des informations du simple fait qu’elles font mention de l’existence d’un délit, ni même d’un crime (voir Secret et connaissance d’un crime).

- Bien que parfois invoqué, l’article 40 du code de procédure pénale ne présente aucun caractère obligatoire pour les fonctionnaires soumis au secret professionnel (voir Secret et connaissance d’un crime, l'article 40 du code de procédure pénale commenté et secret professionnel et fonctionnaires)

Avis convergent avec…

Marie Odile GRILHOT BESNARD, 2013, pages 50 et 51.

Pierre VERDIER, dans sa réponse à l'ANAS en 2011 (voir " Préconisations pour les professionnels soumis au secret et confrontés à des révélations ou constats d’infractions")

Connaissance d'un délit et secret professionnel - Quel impact sur le travail social ?

C’est à partir de ces situations réelles que les professionnels peuvent travailler avec les personnes et favoriser à terme leur retour dans le droit commun. Si ces informations ne peuvent être dîtes au professionnel par crainte d’une dénonciation, les professionnels devraient alors faire avec une situation partiellement factice, certains éléments pourtant essentiels étant masqués. La société et les citoyens ne tireraient aucun bénéfice si les personnes devaient masquer des informations essentielles : pour la société, la non-révélation de la part des personnes auprès de professionnels en position de les aider entraînerait la perpétuation des situations délictuelles ; pour les citoyens, faute de pouvoir révéler et trouver du soutien dans la recherche de solutions, leurs situations risqueraient de se dégrader bien plus, accentuant le mal-être et l’insécurité.

Cette question est donc majeure pour le travail social : travailler avec les éléments de la situation réelle permet de mieux en comprendre les ressorts et d’adopter un plan d’action plus efficace. Au bénéfice des personnes comme de la société.

Pour aller plus loin sur secret et connaissance d'un délit

Vous trouverez sur le site de l’Association Nationale des Assistants de service social (ANAS) un avis technique « Préconisations pour les professionnels soumis au secret et confrontés à des révélations ou constats d’infractions » approfondissant le cadre légal en la matière.

En page 6 sont décrites les impasses que provoquerait un système légal de dénonciation des délits. Extrait :

« Il apparaît que la dénonciation de toute infraction, système qui n’est pas d’actualité comme nous le verrons plus loin mais qui apparaît comme le souhait de certains, constituerait de fait un mensonge, une illusion, une contradiction et une double impasse :

- Le mensonge envers l’usager : « faîtes-moi confiance, dîtes moi ce qui se passe afin que je puisse mieux vous aider », pour au final dénoncer les éléments illégaux repérés dans son discours ou comportement.

- Une illusion car un système de dénonciation encombrerait des services de police et de justice qui sont déjà dans l’incapacité de traiter dans des délais décents nombre d’affaires qui leur sont adressées. C’est l’ensemble de la chaine et des procédures qui seraient impactées négativement, portant un préjudice à celles et ceux qui réclament justice.

- La contradiction, c’est celle de l’impossible convergence entre l’objectif de travail avec la personne et les effets de la dénonciation de ses actes. (…).

- La double impasse : la première peut s’énoncer comme suit ; avec de telles pratiques, si la révélation ou être observé en situation illégale constitue une mise en danger pour la personne, elle adoptera des stratégies pour que ces éléments restent méconnus de l’assistant social. Il y a donc tarissement de la source d’information qui permet de travailler et résoudre les difficultés rencontrées. La deuxième impasse est consécutive de la première. C’est l’augmentation des effets nocifs du comportement pour la personne, son environnement et/ou la société. Ceux qui veulent que soit révélées ces affaires dans un but de limiter les comportements illégaux créeraient ainsi les conditions pour qu’au contraire, ces comportements perdurent et leurs effets s’aggravent du fait de l’absence de soutien. »

Connaissance d'un délit et secret professionnel - Connaître sa responsabilité