Secret professionnel et connaissance d’une fraude

Ce qu’il faut retenir sur connaissance d'une fraude et secret professionnel

- La fraude aux prestations sociales est constitutive d’un délit.

- Pour les professionnels soumis au secret, aucun texte de loi ne crée l’obligation de dénoncer une situation de fraude aux prestations sociales, pas plus qu’il n’existe d’obligation de dénonciation de délit.

- Bien que parfois invoqué, l’article 40 du code de procédure pénale ne présente aucun caractère obligatoire pour les fonctionnaires soumis au secret professionnel (voir l’article 40 du CPP expliqué).

Quel impact a l'article 40 du code de procédure pénale sur le travail social ?

C’est à partir des situations réelles que les professionnels peuvent travailler avec les personnes et favoriser à terme leur retour dans le droit commun. Si ces informations ne peuvent être dîtes au professionnel par crainte d’une dénonciation, les professionnels devraient alors faire avec une situation partiellement factice, certains éléments pourtant essentiels étant masqués. La société et les citoyens ne tireraient aucun bénéfice si les personnes devaient masquer des informations essentielles : pour la société, la non-révélation de la part des personnes auprès de professionnels en position de les aider entraînerait la perpétuation des situations délictuelles ; pour les citoyens, faute de pouvoir révéler et trouver du soutien dans la recherche de solutions, leurs situations risqueraient de se dégrader bien plus, accentuant le mal-être et l’insécurité. Cette question est donc majeure pour le travail social : travailler avec les éléments de la situation réelle permet de mieux en comprendre les ressorts et d’adopter un plan d’action plus efficace. Au bénéfice des personnes comme de la société.

Avis convergent avec…

Marie Odile GRILHOT BESNARD, 2013, pages 50 à 56.

Pierre Verdier dans son avis transmis à l’Association Nationale des Assistants de service social (ANAS) (voir  ci-dessous Pour aller plus loin)

Pour aller plus loin sur la question de la fraude et du secret en travail social

Vous trouverez sur le site de l’Association Nationale des Assistants de service social (ANAS) un avis technique « Préconisations pour les professionnels soumis au secret et confrontés à des révélations ou constats d’infractions » approfondissant le cadre légal en la matière. En pages 24 à 28 de cet avis, l’avocat Pierre VERDIER approfondie la question de la dénonciation d’une fraude et précise « Y-a-t-il obligation de dénoncer ? Très clairement, non ! ».

En page 6 de ce même avis, les impasses que provoquerait un système légal de dénonciation des délits sont énoncées. Extrait :

« Il apparaît que la dénonciation de toute infraction, système qui n’est pas d’actualité comme nous le verrons plus loin mais qui apparaît comme le souhait de certains, constituerait de fait un mensonge, une illusion, une contradiction et une double impasse :

- Le mensonge envers l’usager : « faîtes-moi confiance, dîtes moi ce qui se passe afin que je puisse mieux vous aider », pour au final dénoncer les éléments illégaux repérés dans son discours ou comportement.

- Une illusion car un système de dénonciation encombrerait des services de police et de justice qui sont déjà dans l’incapacité de traiter dans des délais décents nombre d’affaires qui leur sont adressées. C’est l’ensemble de la chaine et des procédures qui seraient impactées négativement, portant un préjudice à celles et ceux qui réclament justice.

- La contradiction, c’est celle de l’impossible convergence entre l’objectif de travail avec la personne et les effets de la dénonciation de ses actes. (…).

- La double impasse : la première peut s’énoncer comme suit ; avec de telles pratiques, si la révélation ou être observé en situation illégale constitue une mise en danger pour la personne, elle adoptera des stratégies pour que ces éléments restent méconnus de l’assistant social. Il y a donc tarissement de la source d’information qui permet de travailler et résoudre les difficultés rencontrées. La deuxième impasse est consécutive de la première. C’est l’augmentation des effets nocifs du comportement pour la personne, son environnement et/ou la société. Ceux qui veulent que soit révélées ces affaires dans un but de limiter les comportements illégaux créeraient ainsi les conditions pour qu’au contraire, ces comportements perdurent et leurs effets s’aggravent du fait de l’absence de soutien. »

 

Voir aussi Secret et connaissance d'un délit et Secret et connaissance d'un crime

Secret professionnel et connaissance d’une fraude - Pour ne pas se tromper de rôle...