Ce qu'il faut retenir en cas de situation de péril pour un professionnel soumis au secret
Si, au regard des éléments en votre possession, les trois conditions définissant le péril sont réunies, alors, comme vous y oblige l'article 223-6 du code pénal, vous devez agir pour faire cesser le péril, directement (en intervenant vous-mêmes) ou en provoquant un secours (appeler pompiers/SAMU ou/et police/gendarmerie selon la situation).
Quelles sont les trois conditions qui définissent le péril ?
Le péril est un niveau particulier de danger. La jurisprudence définit le péril comme suit. La première des conditions est liée à la notion de gravité des conséquences. Il y a péril quand le risque qu'encourt la personne est vital ou pourrait laisser des atteintes physiques graves. Mais ces risques peuvent exister dans un futur très éloigné (par exemple : une femme victime de violence conjugale peut voir celle-ci progresser durant des années jusqu'à atteindre un niveau de danger maximal). D'où le second critère : le péril doit être imminent, c'est à dire que le risque d'impact grave va se produire dans un temps bref. Enfin, troisième condition, il doit être constant. Cela signifie que le péril est certain (au moins considéré comme tel) et pas seulement hypothétique. Lire Secret professionnel et assistance à personne en péril.
Jusqu'où dire pour provoquer un secours ?
Vous devez révéler les éléments suffisants pour que les services de police/gendarmerie et/ou secours médicalisés puissent apporter leur aide à la personne en péril. Cela dépendra donc de la situation concrète. Deux exemples pour illustrer ce point :
- Une personne souffrant de schizophrénie vous appelle au téléphone, elle est manifestement dans une crise forte, avec des mots très clairs sur un passage à l'acte violent qu'elle vous dit devoir commettre. Au regard de ce que vous savez de son histoire, elle a pu connaître des passages à l'acte très violents mettant en danger son voisinage. Elle n'est pas accessible à ce que vous lui dîtes. Dans ce cas, la gravité de l'atteinte possible sur autrui est probable au regard du passé et des propos que tient la personne ; les éléments de connaissance que vous avez (histoire et propos tenus au téléphone) font que, même si vous ne pouvez être totalement certain, le péril n'est pas une simple spéculation et s'avère donc constant ; et l'imminence est constituée par les propos, l'état dans lequel se trouve la personne. Vous avez obligation de provoquer un secours. La voie la plus immédiate serait d'appeler le 15 (aide médicalisée) en indiquant la situation de cette personne (état que vous pourrez décrire factuellement), les éléments de son histoire (centrés sur les passages à l'acte violents pour lui ou autrui et le diagnostic de schizophrénie établi par un médecin-psychiatre) et quels moyens de la trouver (adresse, téléphone portable). Vous pouvez ensuite appeler le 17 (service de police secours) en indiquant que vous venez de signaler au 15 la situation de la personne, en donnant le même niveau de précision en terme d'informations. Savoir que la personne est potentiellement dangereuse doit être connu des services de police/gendarmerie afin qu'ils puissent adapter leur mode d'intervention en complément des services médicaux.
- Une femme victime de violence conjugale vous fait savoir par son portable, que son compagnon est ivre et qu'il veut la tuer. Elle est enfermée dans la salle de bain, Monsieur tente de fracturer la porte pour l'atteindre. Elle le décrit dans un état tel qu'elle pense qu'il va la tuer. Vous savez que quelques mois auparavant, Monsieur a failli tuer cette femme, la laissant pour morte. Elle vous l'a raconté, mais n'a pas voulu porter plainte ni aucune autre démarche. Elle voulait juste vous en parler, à vous. Au regard des différentes éléments, là-aussi, la gravité, l'imminence et la constance sont réunis et permettent de catégoriser cette situation en tant que « péril ». Vous devez appeler le 17, donner les éléments de connaissance et de risques dans lesquelles se trouve la personne, ainsi que ses coordonnées. Ici, cette personne n'est pas blessée, elle a besoin d'une protection que réaliseront très bien les forces de l'ordre. Les policiers ou gendarmes évalueront si une aide médicalisée est nécessaire une fois sur place.
C'est votre évaluation (seul ou avec des pairs) qui permettra de mesurer quelle est l'action la plus adaptée. Mais il est clair que devant le besoin de protection d'une personne en péril, aucune hésitation ou notion de secret professionnel ne doit parasiter le déclenchement d'actions de secours.