Ce qu'il faut retenir en cas de demande de documents par la police ou gendarmerie
L’article 60-1 du code de procédure pénale prévoit que :
«Le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire peut, par tout moyen, requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des informations intéressant l'enquête, y compris celles issues d'un système informatique ou d'un traitement de données nominatives, de lui remettre ces informations, notamment sous forme numérique, sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l'obligation au secret professionnel. Lorsque les réquisitions concernent des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, la remise des informations ne peut intervenir qu'avec leur accord.
A l'exception des personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3, le fait de s'abstenir de répondre dans les meilleurs délais à cette réquisition est puni d'une amende de 3 750 euros.» (article 60-1 du code de procédure pénale)
IMPORTANT : Le terme « informations » a remplacé depuis le 14 novembre 2014 celui de « documents » qui était mentionné depuis 2004. Le législateur a préféré ce terme car il englobe non seulement les documents détenus par la personne ou le service, mais aussi les données informatiques (qui ne sont pas en soi des « documents »). A ce sujet, voir notre fiche L’article 60-1 du code de procédure pénale.
Le terme « informations » ne concerne donc en aucun cas le témoignage du professionnel, dont le cadre reste inchangé. Voir notre fiche Je suis convoqué par un service de police ou gendarmerie pour témoigner.
Les personnes mentionnées aux articles 56-1 à 56-3 du code de procédure pénale sont les médecins, les avocats et les journalistes.
Mais le secret professionnel peut tout à fait être opposé à cette demande pour un "motif légitime"...
Le « motif légitime » n’ayant pas été défini par le législateur, c’est la jurisprudence qui permettra d’en définir les contours. Il peut être intéressant, si vous avez des éléments à apporter pour étayer l’existence d’un motif légitime, d’opposer un refus.
Par exemple, dans une structure accompagnant des personnes toxicomanes, on pourrait légitimement expliquer que donner des informations concernant un usager risquerait d’entraîner une défiance d’une partie importante du public de la structure, risquant à terme de générer des situations de repli et de refus de soin et d’accompagnement en contradiction avec la mission de la structure. Evidemment, la situation devra être appréciée au regard de la nature de l’infraction pour laquelle une enquête est ouverte. On ne répondra probablement pas de la même façon si une personne est recherchée pour vols dans des véhicules ou si elle l’est pour homicides en série…
Et rappelons que la demande d'informations autres que des documents ou données informatiques n'est pas prévue par cet article. Aucun témoignage ou audition ne peut être recueillie sur la base du 60-1 du code de procédure pénale.
…il faudra dans tous les cas prendre le temps d’expurger le dossier de certaines informations
Les éléments que vous remettrez devront être expurgés des informations qui ne concernent pas la personne visée par l’enquête. Des pièces pourront ainsi être retirées d’un dossier concernant une famille entière, si seulement un de ses membres fait l’objet de l’enquête et que les autres membres ne sont pas concernés.
Mais ces pièces ne pourront être remises à un officier de police judiciaire que s’il produit un document indiquant la demande et le contexte dans lequel elle est faîte.
Cela est nécessaire pour plusieurs raisons :
- L’objectif est de mesurer tranquillement le cadre de la demande, de pouvoir échanger avec ses pairs et responsables hiérarchiques de la situation afin de ne pas rester seul, mais aussi de faire en sorte que le simple appel téléphonique ne devienne pas une facilité qui entraînerait un recours trop systématique aux documents détenus par des professionnels ou des services sociaux.
- De plus, ce document pourra attester que, si un document a dû être donné par un professionnel aux enquêteurs, ce n’est pas à l’initiative du professionnel ou de son service que cela a été fait. Cela peut être une information utile pour l'usager concerné qui pourrait ultérieurement vous demander pourquoi vous avez donné des documents le concernant.
- Enfin, quand cette saisine de documents n’est pas vraiment justifiée (l’enquêteur peut essayer en sachant qu’il ne trouvera probablement rien d’intéressant ou pour montrer qu’il a « tout fait », même l’inutile…), le fait d’avoir à faire une démarche de plus (fax ou scan) décourage souvent l’enquêteur d’aller plus loin.
Pour aller plus loin
Fiche L’article 60-1 du code de procédure pénale