Le respect de la vie privée d’un enfant, ce n’est pas que pour les professionnels

Porter atteinte à la vie privée d’un enfant et à son droit à l’image, lorsque les faits relèvent d’un professionnel qui y est soumis, est un cas de violation du secret professionnel.

Lorsque les mêmes faits relevaient des titulaires de l’autorité parentale rien ne venait s’y opposer jusqu’à peu. Du fait qu’ils étaient propriétaires de l’information ils pouvaient en user et même en abuser. Les professionnels d’action sociale pouvaient s’en émouvoir sur le plan éducatif, pouvaient leur conseiller quelques précautions mais ne pouvaient s’appuyer sur aucune loi précise pour étayer leur discours.

La loi 2024-120 du 19 février 2024 marque sur ce point un tournant. Ainsi l’article 371.1 du Code civil est modifié pour intégrer le respect de la vie privée de l’enfant dans les devoirs parentaux. Par ailleurs un nouvel article 372-1 est ajouté qui prévoit que « les parents protègent en commun le droit à l'image de leur enfant mineur, dans le respect du droit à la vie privée mentionné à l'article 9. Les parents associent l'enfant à l'exercice de son droit à l'image, selon son âge et son degré de maturité ».

Certes cette loi a un caractère principalement proclamatif et aucune action pénale ne pourrait être engagée par un mineur contre ses parents dans le cas de méconnaissance de ces prescriptions. Seules des actions civiles (réparation des préjudices subis, retraits des images via un administrateur ad hoc...) et des mesures de protection de l’enfance pourraient être engagées.  

On pourrait d’ailleurs faire grief aux parents de ne rien avoir fait sur un plan judiciaire pour garantir la vie privée de leur enfant en cas de violation du secret professionnel que ce dernier aurait pu subir.  

Evidemment en amont le chantier de la prévention est énorme : comment sensibiliser tôt les parents et futurs parents de la nécessité de respecter et faire respecter la vie privée d’un enfant ? De la « poubelle réalité » aux réseaux sociaux les espaces de dévoiement de l’intime sont légions.

Il nous revient l’interpellation d’une éducatrice nous parlant de la souffrance d’une jeune fille suivie en AEMO et dont les parents avaient accepté quelques années auparavant que « Pascal le grand frère » intervienne chez eux. 5 ans après l’émission continuait à être diffusée au grand dam de leur fille qui pâtissait des remarques acerbes des jeunes de son environnement sans qu’il soit juridiquement possible d’interrompre cette rediffusion.

Cette loi ne changera probablement pas radicalement de telles dérives mais elle marque symboliquement un interdit.   

Christophe DAADOUCH