L’article 434-3 du code pénal
« Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13.» (Article 434-3 du code pénal)
Ce qu'il faut en retenir du 434-3 du code pénal
Les catégories de faits que vise cet article sont les privations, mauvais traitements ou atteintes sexuelles (A noter : une atteinte sexuelle (délit) est provoquée par un majeur qui parvient à une relation de nature sexuelle sur un mineur sans user de « violence, contrainte, menace ni surprise » - l'usage d'un de ces moyens pour arriver à un acte de nature sexuelle non-consenti fait entrer l'atteinte sexuelle dans la catégorie délictuelle de l'agression sexuelle, voire dans la catégorie criminelle du viol).
Les catégories de public que doivent concerner ces actes sont caractérisés par un état de fragilité : les mineurs et les personnes âgées, les personnes malades, atteintes d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique et les femmes enceintes. Alors que jusque là, seuls les mineurs de 15 ans étaient concernés, la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfance ne distingue plus entre les différents âges et ouvre à tous les mineurs.
En cela, cet article, sans être identique, semble recouvrer pour une bonne part les catégories de faits et publics prévus par l'article 226-14 du code pénal, article qui ouvre la possibilité (sans obligation cependant) à transmettre une information à une autorité judiciaire ou administrative.
De façon cohérente avec le 226-14 du code pénal, la dernière phrase du 434-3 du même code excepte du caractère obligatoire d'informer au moins une de ces autorités. La règle est donc que le secret professionnel prime et laisse le libre choix au professionnel pour agir, sans passer nécessairement par l’information à une autorité.
Cependant, le début de cette dernière phrase pose question : « Sauf lorsque la loi en dispose autrement... ». Dans quels cas la loi « en dispose (t-elle) autrement » ?
Marie-Odile Grilhot Besnard (page 122), Jean-Pierre Rosenczveig et Pierre Verdier (page 74-75) convergent pour signifier que la loi en dispose autrement dans l'article 221-6 du code de l'action sociale et des familles.
L'article 221-6 ne concerne que les professionnels participant directement aux missions de l'aide sociale à l'enfance, lesquels doivent transmettre au président du conseil général toute information nécessaire pour déterminer les mesures pouvant être prises pour un mineur et sa famille.
Ainsi, deux cas de figures apparaissent devant cet article 434-3 du code pénal :
- concernant les mineurs, les professionnels participant aux missions d'aide sociale à l'enfance doivent saisir le président du conseil général comme prévu par l'article 221-6 du code de l'action sociale et des familles (voir la fiche consacrée au 221-6 pour mesurer dans quels cas transmettre ou pas une information). Pour toutes les autres catégories de publics visées dans l'article, ces mêmes professionnels sont laissés libres de leur choix d'informer une autorité ou pas. En cas de non-information, ils doivent choisir une action qui permet de faire cesser l'atteinte à la personne fragile.
- tous les autres professionnels ne participant pas directement aux missions d'aide sociale à l'enfance sont laissés libres de choisir d'informer ou pas une des deux autorités. Là aussi, en cas de non-information, ils doivent choisir une action qui permet de faire cesser l'atteinte à la personne fragile.
C'est donc au professionnel d'évaluer, au regard de son cadre d'emploi (mission ASE ou pas) et de la situation, s'il convient d'informer ou pas une autorité d'une situation telle que décrite dans l'article 434-3.
Commentaire complémentaire sur l'article 434-3 du code pénal
J'ajouterai que Marie-Odile Grilhot Besnard (page 122-123) considère que l'article 226-2-1 du CASF concernant la transmission de l'information préoccupante est aussi un cas où la loi impose l'information de l'autorité administrative. Ce n'est pas la lecture que font Pierre Verdier et Laure Dourgnon, qui analysent l'information préoccupante comme une simple possibilité sans caractère obligatoire pour les professionnels soumis au secret, une analyse que nous partageons.
Laurent Puech
Voir les fiches 226-2-1 du CASF, et les fiches Protection de l'enfance.