L'article 345-1 du code de l'action sociale et des familles - Le secret professionnel en CHRS

L'article 345-1 du code de l'action sociale et des familles

« Bénéficient, sur leur demande, de l'aide sociale pour être accueillies dans des centres d'hébergement et de réinsertion sociale publics ou privés les personnes et les familles qui connaissent de graves difficultés, notamment économiques, familiales, de logement, de santé ou d'insertion, en vue de les aider à accéder ou à recouvrer leur autonomie personnelle et sociale. Les étrangers s'étant vu reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile peuvent être accueillis dans des centres d'hébergement et de réinsertion sociale dénommés " centres provisoires d'hébergement ". 

Les centres d'hébergement et de réinsertion sociale, dont les conditions de fonctionnement et de financement sont prévues par voie réglementaire, assurent tout ou partie des missions définies au 8° du I de l'article L. 312-1, en vue de faire accéder les personnes qu'ils prennent en charge à l'autonomie sociale. 

Ce règlement précise, d'une part, les modalités selon lesquelles les personnes accueillies participent à proportion de leurs ressources à leurs frais d'hébergement et d'entretien et, d'autre part, les conditions dans lesquelles elles perçoivent la rémunération mentionnée à l'article L. 241-12 du code de la sécurité sociale lorsqu'elles prennent part aux activités d'insertion professionnelle prévues à l'alinéa précédent. 

Des places en centres d'hébergement et de réinsertion sociale sont ouvertes à l'accueil des victimes de la traite des êtres humains dans des conditions sécurisantes. 

Les personnels des centres d'hébergement et de réinsertion sociale sont tenus au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Par dérogation au même article 226-13, ils peuvent échanger entre eux les informations confidentielles dont ils disposent et qui sont strictement nécessaires à la prise de décision. »

 

Commentaires sur le 345-1 du CASF : Le secret professionnel et le partage d'informations en CHRS

 Le complément au 345-1 du code de l'action sociale et des familles concernant la soumission des personnels au secret avec possibilité de partage entre eux de certaines informations est une nouveauté légale pour deux raisons : il soumet au secret un ensemble de professionnels qui ne l'étaient pas et il ouvre une nouvelle possibilité de partage d'informations.

 Il soumet l'ensemble des personnels des CHRS au secret professionnel, ce qui n'était pas le cas jusqu'à la loi du 4 août 2014 relative pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes. Par exemple, un assistant social l'était par profession tandis qu'un éducateur ne l'était pas. Aujourd'hui, chacun y est soumis.

 Cela signifie que chaque membre du personnel d'un CHRS voit désormais sa responsabilité pénale individuelle engagée en cas de violation du secret professionnel. Il oblige chacun à être au clair avec ce qu'est le secret professionnel et sa responsabilité en la matière.

 Cet article ouvre, par dérogation au 226-13 du code pénal, une nouvelle possibilité légale de partage d'informations entre ces personnels soumis au secret, mais avec certaines limites.

 L'expression « (…) ils peuvent échanger entre eux » indique que le partage relève d'une simple possibilité pour chaque professionnel du CHRS. C'est donc une autorisation et pas une obligation. (Voir Distinguer entre interdiction, autorisation et obligation de lever le secret). Cela laisse donc une marge de manœuvre à tout professionnel d'un CHRS. Seul lui peut décider du partage ou pas d'une information.

 Le partage ici autorisé est limité aux professionnels du CHRS « entre eux ». Cet article ne peut donc en aucun cas constituer l'argument légal qui autoriserait un partage d'informations vers des acteurs extérieurs au personnel du CHRS. 

 Les informations partagées doivent être seulement celles « qui sont strictement nécessaires à la prise de décision ». Cela exclue toute information qui n'aurait pas vocation à participer à une prise de décision concernant l'accompagnement de la personne au sein du CHRS ou dans son parcours.

 

Loi 2002-2 et secret professionnel en CHRS : articuler les articles L345-1 et L311-3 du CASF

En venant s'appliquer aux personnels des CHRS, l'article L345-1 s'ajoute en fait à un cadre précisé par la Loi 2002-2 rénovant l'action sociale et médico-sociale précisant les droits des personnes accueillies dans ces structures, notamment aux informations les concernant. Pour penser la circulation et la non-circulation des informations, il faudra donc combiner ce que prévoient les articles L345-1 et L311-3.  

L'article L311-3 du CASF qui précise plusieurs obligations importantes, que nous articulons ici avec la question des informations et du secret :

 Respect de la vie privée, de l'intimité, de la dignité : en matière d'informations, respecter la personne, c'est restreindre la possibilité de circulation des éléments concernant la vie privée, l'intimité. L'associer à la question de la circulation ou pas d'une information, c'est une des conditions de respect de sa dignité

 Prise en charge « respectant son consentement éclairé qui doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision » : ainsi, le partage autorisé d'informations entre professionnels d'un CHRS ne l'étant que dans l'objectif de produire une décision, le consentement éclairé doit être recherché dès la question du partage ou pas des informations jusqu'à son résultat : la décision.

 Ces comportements sont une des clés pour satisfaire à une autre obligation légale : « la confidentialité des informations ». Ils sont aussi un moyen pour parvenir à l'objectif énoncé comme étant un de ses droits par ce même article L311-3 du CASF : La participation directe de la personne à la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne.

 

Pour une analyse plus complète de cette nouveauté légale, voir aussi sur le Blog

Le secret arrive en CHRS dans de "drôles" de conditions et avec des conséquences paradoxales